Reprendre un restaurant : les réflexes à adopter côté acquéreur pour sécuriser le bail commercial‍

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Acheter un restaurant, c’est aussi reprendre un bail

Dans une cession de fonds de commerce, un restaurateur acquéreur n’achète pas seulement un concept, une clientèle et du matériel.


Il reprend avant tout un bail commercial, c’est-à-dire le droit d’exploiter les locaux où s’exerce l’activité.

Ce bail, souvent négligé lors des premières discussions, est pourtant l’actif juridique central du fonds : il fixe la durée d’occupation, le montant du loyer, la nature des travaux à charge du locataire et la stabilité future de l’exploitation.

Un bail mal rédigé ou mal transmis peut fragiliser toute l’opération.

Voici donc les bons réflexes à adopter avant de signer, pour sécuriser juridiquement et économiquement la reprise de votre restaurant.

1. Le bail commercial, fondement juridique du fonds de commerce

L’article L.145-1 du Code de commerce donne au locataire d’un bail commercial un droit au renouvellement.

Ce droit, appelé propriété commerciale, est transmis à l’acquéreur lors de la vente du fonds (art. L.145-16 C. com.).

Concrètement :

  • le bail se transfère automatiquement à l’acquéreur,
  • les clauses et conditions (durée, loyer, destination, indexation) continuent à s’appliquer,
  • mais le bailleur conserve un droit de regard, notamment via une clause d’agrément ou d’information.

💡 L’acquéreur doit lire le bail comme un contrat qu’il va lui-même exécuter pendant plusieurs années, pas comme une simple formalité administrative.

2. Diagnostiquer la situation du bail avant toute signature

Avant de s’engager, il faut auditer le bail et analyser sa situation juridique. Un bail sûr et équilibré, c’est une exploitation pérenne et une rentabilité maîtrisée.

🔍 Les points à examiner avec attention

1. Durée restante du bail

Le bail commercial est conclu pour neuf ans, mais la cession peut intervenir à tout moment.
Un bail avec au moins six ans restants rassure les banques et les investisseurs.
En revanche, un bail en tacite prolongation ou proche de l’échéance fragilise la reprise : le bailleur peut donner congé avec un préavis de six mois.

2. Destination du bail

Le bail doit autoriser l’activité réellement envisagée (ex. : “restauration sur place et à emporter”, “salon de thé”).
Une activité différente nécessitera une déspécialisation partielle ou plénière, qui demande l’accord du bailleur (et qui peut coûter très cher, en moyenne 10.000 euros).

3. Loyer et indexation

Vérifier la clause d’indexation (ILC) et le plafonnement du loyer.
Certaines clauses anciennes sont déséquilibrées ou illégales (variation à la hausse uniquement, indexation sur un indice non économique).
Un bail avec un loyer cohérent et indexation régulière, c’est un fonds économiquement stable.

4. Clause de solidarité

Si le cédant reste solidaire après la vente (art. L.145-16-2 C. com.), la clause doit être encadrée : durée maximale de trois ans, notification au bailleur obligatoire.

5. Travaux, charges et gros entretien


Vérifier si des charges ou travaux sont indûment transférés au locataire (toiture, murs porteurs, mise aux normes…).
Une clause trop large peut créer des dépenses imprévues.

6. Autorisation du bailleur à la cession


Certaines clauses imposent un accord écrit du bailleur avant toute cession. Son absence peut rendre la vente inopposable ou contestable.

✅ Check-list de contrôle avant signature

  • Copie complète du bail et de ses avenants reçue
  • Durée restante ≥ 6 ans
  • Bail non expiré, ni en tacite prolongation
  • Destination compatible avec l’activité projetée
  • Clause d’indexation conforme à l’ILC
  • Absence de litige locatif ou de procédure en cours
  • Accord ou absence d’opposition du bailleur vérifié

3. Les erreurs classiques des repreneurs

Signer sans auditer le bail.


Un acquéreur pressé, rassuré par le notaire ou le cédant, néglige parfois de relire le bail. Or certaines clauses (travaux, indexation, destination) peuvent exploser les coûts d’exploitation.

Sous-estimer la fin de bail.


Acheter un fonds avec un bail arrivant à échéance dans 6 mois ou en tacite prolongation, c’est courir le risque d’un refus de renouvellement ou d’un loyer déplafonné.

Ignorer les formalités de cession.


Certaines ventes échouent faute d’avoir respecté la clause d’agrément ou d’avoir notifié correctement la cession au bailleur (art. 1690 C. civ.).

Oublier le droit de préemption de la mairie.


En zone de préemption, la commune dispose d’un droit prioritaire d’achat du fonds de commerce (art. L.214-1 C. urb.).
Sans purge préalable, la vente est suspendue.

4. Les bons leviers de négociation avant la reprise

Même dans une cession, il est possible de renégocier certaines clauses du bail avec l’accord du bailleur.

Leviers à activer

  • Avenant de confort : le bailleur confirme par écrit qu’il ne donnera pas congé avant 3 ans.
  • Ajustement du dépôt de garantie ou des cautions personnelles.
  • Clarification de l’indexation (passage à l’ILC pour les restaurants).
  • Mise à jour de la destination pour coller à la nouvelle offre (par ex. “restauration sur place, à emporter et bar à vins”).
  • Renouvellement anticipé : si le bail arrive bientôt à échéance, négocier son renouvellement avant la signature du fonds.

🎯 Objectif : remettre le bail à jour avant la reprise, pour qu’il soit clair, conforme et rassurant pour toutes les parties.

5. Que faire si le bail est en fin de vie ?

Si le restaurant que vous souhaitez reprendre est en fin de bail, il faut décider rapidement d’une stratégie :

🔹 1. Exiger le renouvellement avant la cession

Le cédant peut demander le renouvellement et transférer ensuite le bail neuf. Cela sécurise totalement la transaction.

🔹 2. Signer sous condition suspensive de renouvellement

L’acte de vente devient définitif seulement si le bail est renouvelé dans les délais. C’est la protection la plus efficace pour l’acquéreur.

🔹 3. Obtenir un avenant du bailleur

Le bailleur peut confirmer par écrit que le preneur sera maintenu dans les lieux pendant une période minimale. Cette lettre suffit souvent pour rassurer les banques.

⚠️ Évitez d’acheter un restaurant avec un bail en tacite prolongation : juridiquement, vous pouvez être évincé en six mois, sans indemnité.

6. Après la cession : sécuriser la transmission et les formalités

Une fois la vente signée, quelques démarches sont essentielles :

1️⃣ Notifier la cession au bailleur (article 1690 du Code civil ou selon clause du bail).
2️⃣ Mettre à jour l’assurance multirisque professionnelle.
3️⃣ Informer la mairie si une terrasse ou une licence IV est attachée au local.
4️⃣ Signer un état des lieux contradictoire à la date de reprise.
5️⃣ Vérifier la reprise effective des contrats (énergie, entretien, extraction, sécurité incendie).

🧾 Ces étapes protègent l’acquéreur contre tout recours ultérieur du bailleur ou du cédant.

✅ Check-list pratique pour l’acquéreur restaurateur

  • Bail audité par un professionnel avant signature
  • Durée restante sécurisée (≥ 6 ans)
  • Destination conforme à l’activité future
  • Loyer et indexation vérifiés
  • Clause d’agrément respectée
  • Droit de préemption purgé
  • État des lieux contradictoire signé
  • Assurance et contrats mis à jour

Conclusion – Un bail bien analysé, c’est un restaurant sécurisé

Reprendre un restaurant sans examiner le bail commercial, c’est acheter à l’aveugle.
Le bail conditionne la rentabilité, la stabilité et la revente future du fonds.

Un audit juridique complet permet de :

  • repérer les clauses à risque,
  • négocier les bons ajustements,
  • et rassurer les financeurs avant la signature.

⚖️ Le bon réflexe : faire auditer le bail avant toute reprise. C’est la meilleure garantie de rentabilité et de sécurité juridique pour votre futur restaurant.

📞 Le cabinet Louis Pinet accompagne les repreneurs de restaurants à chaque étape de la transaction.

Analyse complète du bail, des clauses sensibles et de la valeur locative avant reprise.

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